dimanche 7 avril 2013

Ce que veulent les Alpes




> Mardi 2 avril.

Chambéry-Challes les eaux
Entre Chambéry et Challes les eaux s'étend une large zone commerciale semblable à tant d'autres. Interminable, monotone, triste. Mais au bout, en plein cœur de Challes, niche une maison vivante. D'architecte mais façonnée par ceux qui y vivent. Nous partageons deux soirées de couchsurfing passionnantes avec eux qui nous ont si spontanément ouvert la porte d'une chambre sans nous connaître. Ici on a déjà voyagé un an autour du monde, on cherche des transitions vers la simplicité, on a traversé des océans à la rame, on prévoit de rallier l'Amérique dans un voilier manoeuvré par des jeunes en réinsertion. Notre hôte musicien vole en parapente, soigne ses poules et cultive son jardin.

Lyon-Turin
Pourquoi être venus à Chambéry ? Parce que bien au-delà de la simplicité heureuse de nos hôtes couve ici un projet de « développement » qui mérite d'être interrogé. Sur les rails depuis 20 ans, le projet ferroviaire du Lyon-Turin menace de s'enflammer à l'image d'un Notre-Dame des Landes.

Entre Lyon et Turin existe une ligne de train qu'empruntent des TGV et des wagons de fret ferroviaire. Des élus locaux, ainsi que le gouvernement, soutiennent le projet de réalisation d'une seconde ligne qui réclamera de percer la montagne entre Modane en France et Suse en Italie sur 57 km. Le tunnel actuel en fait 12.

Une coordination d'opposants dénonce cet investissement à 30 milliards d'euros. Nous les avons rencontrés. Depuis un an, ils démontent dans un travail patient et obstiné les arguments des promoteurs sur l'utilité même du projet. Ils posent des questions que la commission d'enquête d'utilité publique a tenté d'éluder, pour des raisons peu avouables de conflits d'intérêts larvés. Experts citoyens, ils entendent démontrer que l'on peut moderniser une ligne du 19e siècle pour l'adapter aux besoins, raisonnés et raisonnables, du 21e. Ils parlent optimisation de la ligne existante en terme de ferroutage et priorisation des besoins régionaux en transports collectifs. Des questions complexes qui méritent d'être posées dans un réel débat citoyen. La coordination est déjà soutenue par la confédération paysanne, France Nature Ecologie, Europe Ecologie les Verts. Dans ce dossier subtil, défendre l'environnement n'est pas vouloir à tort et à travers n'importe quel projet de greenwashing. De quoi avons-nous réellement besoin ?

Nous l'avons emprunté ce Lyon-Turin, pour nous de Chambéry à Milan. Un petit air de fronde.

Bon à savoir : Le jambon Aoste vient d'Isère, contrairement au jambon d'Aoste. Une réunion de la coordination des opposants nous ayant conduit jusqu'en Isère à Chimilin, nous avons pu découvrir un petit village voisin « Aoste » vantant les mérites de son jambon. Intrigués, nous avons eu une explication par un des opposants. Propriété du groupe agroalimantaire Aoste, le jambon d'Isère n'a rien à voir avec la véritable spécialité de jambon cru d'Italie. Ici, les carcasses viennent de Chine ou des Etats-Unis. La commission européenne a d'ailleurs du intervenir en 2008 pour que cesse la confusion. Depuis la marque ne peut aposer le terme « Jambon d'Aoste », mais plus sobrement « Jambon Aoste ».

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