vendredi 10 mai 2013

D'Herzégovine en Bosnie




> Mardi 30 avril. Nous partîmes de Mostar vers Banja Luka, passant par Sarajevo. La route en ce sens retrace elle-même l'Histoire de la Bosnie-Herzégovine et dévoile les différents visages de ses habitants. Du pont ottoman de Soliman à Mostar, reconstruit en 2004 car pilonné pendant la guerre, aux multiples mosquées de Sarajevo, elles aussi restaurées après le siège de 92-95, jusqu'aux églises orthodoxes de la république Srpska, enclave peuplée majoritairement de Serbes, la mosaïque se tisse peu à peu pour nous. Sans jamais cesser d'être plurielle et complexe.

La route

Après quelques jours à Sarajevo, passés arpenter les quartiers turc et austro-hongrois, nous décidons de prendre le chemin de la République Srpska. Entité Serbe enclavée dans la Bosnie Hercégovine, sa reconnaissance a été l'une des conditions des accords de paix de Dayton en 1995. Nous allons dans un tout petit village perdu dans la forêt, quelque part près de Mrkonjic Grad.
Il n'existe aucun bus entre Sarajevo et cette petite localité. Nous tentons le bus pour Bihac, à la frontière Nord-Ouest de la Bosnie, sa tangente passe semble-t-il à Mrkonjic. Nous sommes les seuls étrangers. Le voyage a comme un petit air de dimanche à la campagne. Tout le monde s'apostrophe. Le chemin de lacets sillonne et voltige à travers cols et vallées, fleuries de minarets rutilants. Une femme est malade des soubresauts. Aussitôt la fourmilière s'agite. Cinq ou six personnes l'entourent -de l'air de l'eau et un éventail qui s'agite. Bientôt tout le monde sait que nous allons à Mrkonjic Grad. Las, le chauffeur est intraitable, notre billet n'est que pour Jajce, nous allons devoir y descendre et tenter de finir les 30km restants par nos propres moyens.

La crise

Un ange passe. Il s'appelle Aldin. Vingt-trois ans, le sourire avenant, l'anglais hésitant, il parlemente pour nous, paie lui-même un petit supplément et nous offre un soda. Nous irons jusqu'à Mrkonjic Grad. Lui voudrait visiter Paris avec sa future femme, il se marie le mois prochain. Comment faire avec un salaire mensuel moyen en Bosnie de 250 euros ? Aldin a fait des études de théologie de l'Islam mais il ne peut trouver de travail dans son pays, pour le moment il aide son père dans une petite affaire de location de voiture. L'an prochain il aura un enfant, « Inch'Allah », et peut-être qu'un jour il vivra en Finlande, pays où les forêts sont immenses et où il pense avoir la place qu'il faut pour ses rêves.

Plus loin, à Banja Luka, capitale de la république Srpska, un autre jeune homme nous viendra en aide. Il nous guide dans le centre de sa ville et nous parle laconiquement de lui. Ici, il semble que la parole attende le visiteur pour s'épancher, si brève soit la rencontre. Serbe installé avec ses parents en Bosnie peu avant la guerre, il a étudié à Belgrade et cherche un emploi au cadastre. En vain, peut-être lui faudra-t-il quitter son pays.
Bosniaques, musulmans, ou Bosniens, serbes, la crise semble être aujourd'hui le dénominateur commun à tous ceux que la guerre avait opposés.

Photos : Mostar, Sarajevo, Aldin, Banja Luka



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