lundi 29 juillet 2013

La route du pétrole










> Vendredi 5 juillet. Nous pensions partir pour la route de la Soie, celle du pétrole nous a rattrapés. Les vestiges des caravansérails comme éclipsés par les champs de derricks dans le désert. Comment ne pas admettre que le commerce de l'or noir a simplement pris le pas sur celui des étoffes, tirant encore et toujours l'Est vers l'Ouest par les mêmes courants.

Dans le Caucase, nous avons mûri notre trajet et finalement décidé de laisser de côté l'Iran et le Turkménistan, le temps nous étant maintenant compté pour un rendez-vous en Chine et les procédures promettant d'être au mieux fastidieuses. De la Turquie au Kazakhstan donc, passant par la Géorgie et l'Azerbaïdjan, nous aurons posé nos semelles sur l'oléoduc Baku-Batumi-Ceyhan et au-delà vogué de concert avec les pétroliers de la Caspienne, chargés du carburant kazakh en partance pour l'Europe. Un voyage à travers d'anciennes républiques soviétiques maintenant pions dans la politique d'indépendance énergétique de l'Europe face à la Russie.

En Azerbaïdjan, nous aurons été pauvres à Baku, parmi les nouveaux princes du pétrole, et proies pour les plus laissés pour compte du pays dans les villages du Caucase. Comment ne pas le comprendre dans un pays traversé de tant de contradictions ? Malgré tout, le manque de sincérité dans les relations nous aura pesé, jusqu'à notre rencontre providentielle à Quba avec un couple de Belges, Claude et Michèle. Claude avait déjà pris la température du pays en 2006 comme observateur belge des élections présidentielles pour le compte de l'OSCE. Armé de bons rudiments de russe et de l'envie d'explorer plus avant le pays, il nous aura permis de vivre des moments émouvants avec les bergers de Xinaliq, près de la frontière avec le Daguestan. Avec les rires de Mehmet et Zahra, les enfants des villageois chez qui nous logions alors, nos seuls instants de vérité.

L'Azerbaïdjan nous aura mis une sacrée droite : l'effet le plus pervers du pétrole n'obscurcit pas uniquement l'atmosphère mais aussi les âmes, perverties et noircies. Comment imaginer que le sourire et la compassion puisse naître d'une énergie tirée de la mort, au plus profond de terres desséchées ? Une remise en cause toute personnelle. Même si nous suivons une route terrestre, notre mouvement est en très grande partie mû par le pétrole. Pas uniquement bien sûr, d'autres énergies nous propulsent tout autant, l'envie de rupture, d'aventure, de rencontres. Peut-être aurons-nous beaucoup moins besoin à l'avenir de l'énergie noire mortifère. Peut-être irons-nous nous-mêmes vers plus d'authentique. Quelles énergies nous permettront alors de continuer à avancer ? Le voyage participera sans doute de la réponse.

Photos: volcans de boue de Gobustan, Baku, Lahic, Xinaliq











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