> Jeudi 17 octobre. Il ne nous aura pas semblé de peuple
plus aimable que le peuple taïwanais. A Taipei, Jack et sa famille,
rencontrés à Matsu, nous offrent l'hospitalité, dans une
générosité sans bornes. Nous voici logés dans un appartement dont
ils disposent à Taoyuan, dans la banlieue de Taipei, et qu'ils
n'occupent pas. Un havre de paix et de finesse, panneaux glissants
japonais et partout petites théières que collectionne patiemment le
maître des lieux. Sans jamais se lasser, il nous fait découvrir les
beautés de sa région, ses délices culinaires et partage avec nous
les questions de l'existence. Jack, c'est une figure de père digne
d'un Goriot, qui nous couve comme il couve sa famille toute féminine,
trois filles et sa femme. Un intourmentable optimiste, le sourire
férocement vissé aux lèvres. Un bouddhiste qui un jour a fait vœu
de végétarisme pour mettre sa famille sous la protection des dieux.
Il pense qu'on ne se rencontre jamais par hasard.
Photos : Mataian, Cimei, Shihtiping, Taipei, Taroko, Jipen
Taoyuan, Jack et sa famille avec Romain et Lise, Chantal, Jack
Photos : Mataian, Cimei, Shihtiping, Taipei, Taroko, Jipen
Taoyuan, Jack et sa famille avec Romain et Lise, Chantal, Jack
Lise, une amie, nous ayant rejoints
pour quelques jours, nous partons explorer plus loin l'île.
L'occasion d'en saisir trop brièvement les multiples facettes,
splendeurs naturelles, et encore une fois de se frotter à une
humanité plus grande que la notre. Nous trouvons-nous au bord d'une
route de montagne, à des lieues de la ville la plus proche et de
tout transport collectif ? Il se présente un couple qui en
moins de temps qu'il ne faut pour le dire glisse prestement ses
enfants dans le coffre ouvert derrière les sièges pour nous assurer
un convoyage vers la côte. Au retour, ce sera un autre couple qui
déviera son trajet de plusieurs dizaines de kilomètres et
tournoiera sur de sinueuses routes de montagne pour nous déposer à
notre hôtel.
Les taïwanais héritent de la plus
noble histoire chinoise, moins le traumatisme du maoïsme, un certain
passé japonais en plus. Un mariage de finesse, d'érudition et de
spiritualité. L'île pullule de temples taoïstes, bouddhistes et
confucianistes, d'églises chrétienne, héritage sans doute de son
passé hollandais et espagnol et du temps de la conversion des
aborigènes, mais aussi de sources thermales exploitées par les
occupants japonais avant la seconde guerre mondiale. Les influences
se marient sans heurts dans ce creuset sans revendication majeure
d'identité politique propre. L'île a choisi depuis des décennies
de mettre l'accent sur le développement économique, acceptant des
compromis pour ne pas froisser la Chine continentale tout en
s'assurant une place dans l'échiquier extrême-asiatique. Une chance
peut-être en un temps mais aujourd'hui la jeune génération
consumériste semble en passe de laisser s'étioler ce que leurs
aïeuls avaient voulu préserver en leur temps du communisme à la
Mao et de la révolution culturelle.
Nous y serons bien, à Taïwan. A peine
senti puis heureusement oublié un tremblement de terre relativement
important que nous essuierons en son épicentre vers Hualien. Pas de
dégâts, et c'est bien encore la félicité qui nous comble. Nous
avions longuement hésité entre Taïwan et les Philippines avant
d'opter pour la première, bien plus simple à rallier par la mer.
Aujourd'hui, nous frémissons de loin, comme les taïwanais et les
immigrés philippins, au passage du super-typhon Haiyan aux Philippines.
Photos : Kenting, Tainan, Yeliu, Jinshan, Yilan